Grand Charnier d'Allevard : face NW

Grand Charnier d'Allevard : face NW (Belledonne)
27 janvier 2010


 

la face Ouest du Grand Charnier d'Allevard depuis le sommet des pistes du Collet, 800m de déniv à 40° en moyenne, la fin de la face est dans la bouillasse...

 

 

Beau temps, grosse poudre, créneau dispo en semaine : j’ai envie de sortir ! Agenda skitour et coup de fil à gauche et à droite, 20h et toujours rien. Plus tard un gars me rappelle mais ne sait pas ce qu’il veut, puis Eric me contacte et sait très bien ce qu’il veut. Çà tombe bien car çà me dis bien, sauf que le premier gars ne veut pas faire du raide : instant diplomatie et finalement je donne rdv à Eric pour le lendemain, objectif les faces NE et NW du Grand Charnier d’Allevard, miam miam.

 

les faces SW (ombre) et Sud (soleil) des Grands Moulins au dessus des nuages

 

 

Du coup on prévoit deux bagnoles, une qu’on laisse en bas du vallon du Veyton, l’autre pour monter à Super Collet. On prend le ticket randonneur et en moins de deux on est à plus de 2000m non sans s’être caillés les miches à froid sur le télésiège…

 

le Grésivaudan sous la nasse : la vie est belle là-haut...

 

 

Là-haut, on chope le soleil et c’est tant mieux car il faisait –10°C à la bagnole. Tempête de ciel bleu et mer de nuage, la journée commence bien, jusqu’à ce qu’Eric ne se fasse prendre dans une coulée au pied de la crête menant au col de Claran. Il a failli descendre jusque dans une goulotte en dessous, mais non il a pu s’arrêter à temps, ouf ! Un joker de griller comme on dit.

 

la trace d'Eric se perd dans la coulée...

 

 

...il a eu chaud

 

 

Du coup on ne se sent pas trop de remonter au Grand Charnier par l’éperon direct car il est de même orientation que la pente qui a purgée. Au sommet du Petit Charnier, on hésitera entre descendre en Ouest, ou en Est. En Est çà a l’air un peu plaqué avec une belle corniche au sommet alors qu’en Ouest çà semble pas si mal, je tente, fais deux virolos puis tombe dans de la croûtée, je remonte en passant NW et là c’est pas mal. Mais on choisira de prendre la combe Est. C’est pas terrible car la neige est soufflée, avec des alternance de zones d’accus et de zones de croûte épaisse.

 

la montée au Petitt Charnier : alpine...

 

 

On remonte ensuite en direction du couloir de la Balmette, et arrivé sous ledit couloir, c’est béton et on est obligés de mettre les couteaux. En plus c’est déjà bien ravagé alors on se dit qu’il faut rejoindre la rive gauche, au niveau de la crête qui sépare ce vallon de celui de la face Nord. A partir de là, on remonte en direction du sommet via une croupe redressée puis un petit couloir fermé par une petite corniche : bien alpin.

 

Eric dans la descente de la facette SE du Petit Charnier d'Allevard, au fond les Grands Moulins

 

 

De là on bascule au soleil et on profite du moment pour se restaurer un peu. J’ai un peu ramé depuis ce matin et Eric me chambre gentiment. J’ai un timing assez serré car je dois rejoindre Oli sur Grenoble pour 16h45 et là je sens que si on redescend côté Férices il va falloir remonter au Collet et çà va prendre du temps, et je suis pas dans un grand jour… Du coup je tanne Eric pour qu’on aille voir cette face NW, avec le bon espoir que la neige soit bonne car de toutes les orientations qu’on a vu depuis ce matin, aucune n’est bonne, à part peut être NW comme j’ai pu le soupçonner au Petit Charnier tout à l’heure.

 

c'est nimp les p'tits skis !

 

 

Çà n’a pas l’air croûté mais plutôt plaqué, je descends tranquillou pour rejoindre l’éperon qui sépare les voies Charlotte et Dory de la notre, et c’est vrai que les premiers 50m sont pas terribles, avec une petite couche de fraîche avec cohésion reposant sur un fond dur soufflé parsemé de caillasses, bof bof.

 

au pied de la face N du Grand Charnier, vue vers le vallon de Saint-Hugon, les Grands Moulins et le Grand Miceau

 

 

A partir de l’éperon par contre çà change tout et on a droit à une fraîche terrible, stable, et la pente s’accentue un peu, pour atteindre les 38-40° : çà sent bon. Eric n’est pas très confiant mais il me fait confiance. Je m’enhardis un peu et commence à envoyer des grandes courbes : rien ne bouge, pas même une petite coulée et la neige est tellement bonne. Eric me suit mais avec ses skis ultra light il est obligé de skier à l’ancienne et à faire de la "braguette" si bien que çà déclenche des petites coulées car ce type de virage met beaucoup plus d’appui sur le manteau.

 

sur l'éperon séparant la face N du vallon de la Balmette

 

 

faudra aussi aller visiter cette cime du Grand Miceau, y'a l'air d'avoir de beaux trucs

 

 

Je pense qu’il apprécie mais n’est pas vraiment serein. Du coup les rôles sont inversés et c’est maintenant moi qui attend ^^. Mais quel pied ! Après 200m de ce traitement, la pente s’accentue encore pour venir chatouiller les 45° mais c’est beaucoup plus étroit. On ne peut plus se lâcher pareil mais c’est sympa aussi le "serré". Après ce couloir, çà s’élargit et on rencontre une pente parsemée de goulets, d’arbres, de ravins et de croupes où l’on peut envoyer des courbes, des sauts, faire des virages sur les croupes à la manière des skate-boarders sur une rampe, génial !

 

Eric s'attaque à la corniche qui défend la sortie de la face N

 

 

Sauf qu’on hésite entre deux traces à suivre, vu qu’il y en a deux… Une qui ramène sur la gauche pour passer sous la face, une autre qui file vers la droite et le vallon du Veyton. On choisira la seconde car il nous faut rejoindre le Veyton, mais c’est une erreur. J’ai bien un doute car il me semble que le topo indiquait à gauche mais Eric, qui a une ancienne version me dit n’avoir lu aucune indication, et la logique voudrait qu’on aille à droite.

 

une fois sortis de la face N, le sommet est en vue (le dôme à gauche de la pointe)

 

 

On descend et on sait qu’on doit rejoindre une piste forestière à 1250m mais on entre dans la mer de nuage aux environs de 1500m et çà sent pas très bon. On suit une sente puis un couloir mais il n’y a plus de traces. Je m’en veux un peu mais vu qu’on a une corde je ne me fais pas de souci mais pour le rdv avec Oli c’est raté ! On descend tant qu’on peut dans un goulet et dans la nasse jusqu’à ce qu’il nous mène au niveau d’une cascade. Sauf qu’on voit rien vers le bas et il nous reste encore 200m à descendre.

 

 

alors là, çà commence à sentir bon !

 

 

l'ambiance de la face NW, ici c'est vers la Charlotte et Dory, faut pas s'paumer... derrière Puy Gris, Comberousse...

 

 

Je tente d’aller voir vers la gauche et vu qu’il y a des traces de chamois, je me dis que çà doit bien passer quelque part. Eric voudrait descendre mais je ne suis pas chaud pour utiliser la corde si on a une autre option, et puis on ne voit pas bien la hauteur et la corde fait 30m donc faudrait pas looser un peu plus encore. Le climat est tendu car on fait les sangliers et les skis nous gênent, on remonte parfois et il y a aussi quelques traversées scabreuses mais vu la densité de la forêt belledonnienne au moins on sait qu’on peut se retenir en cas de glissade.

 

si si, c'est bien un p'tit 40°

 

 

Eric commence à avoir sa cheville qui le fait souffrir et il y a des passages un peu techniques alors je lui suggère de poser une main courante et après la pente s’adoucie et les arbres sont moins rapprochés, çà sent bon mais avec les skis sur le dos, je bute dans encore 20000 branches et j’ai deux mètres cubes de neige qui me sont rentrés dans le cou jusqu’au fesses quand j’arrive au chemin : yeeessss !!!

 

dans le bas de la face NW : j'crois qu' j'ai été un poil optimiste, çà a failli faire...

 

 

Comme par hasard, au niveau du chemin on est sous la couche de nuage. En gros elle nous a fais chier juste au moment où l’on étais dans la merde, les boules ! Puis le niveau des nuages fluctue un peu et on aperçoit la cascade qui barrait le goulet initial : on a bien fait de la contourner car çà ne passait pas en un seul rappel…

 

la première partie de la face, avec le haut plus cool, et le goulet plus raide

 

 

A partir de là, on glisse pendant plusieurs bornes sur une pistes tracée qui remonte un peu de temps à autre et on arrive finalement à la voiture skis aux pieds à 550m d’altitude soit 1150m de D+ et 2600 de D- !

 

maintenant ça va être moins rigolo

Manip de voiture, puis on repasse au dessus des nuages en arrivant à Super Collet et là c’est magique car les arbres sont givrés et la lumière très belle, donnant une teinte orangée à la neige. Dommage qu’on ne voit pas la face d’ici car çà aurait eu de la gueule. J’arriverai à Grenoble bien à la bourre et Oli me pardonnera le retard mais je crois que çà va me coûter un retour dans cette face NW en sa compagnie ^^.

 

le goulet emprunté et la cascade qui le défend, on a fait les sangl... euh les chamois par la droite

 

 

J’ai mal géré l’itinéraire de la fin et me suis concentré sur le début qui il est vrai est super important sous peine de se retrouver dans un voie encore plus dure. De plus, dans la communication je me suis parfois un peu laissé aller à voix haute sur le fait qu’on ait été bêtes d’avoir suivi les traces de droite et je pense qu’Eric l’a pris pour lui car c’est lui qui l’a suggéré, je regrette car çà a tendu quelque peu le climat pendant qu’on était dans la mouise alors qu’il fallait justement rester sereins. Bon, on avait prévu la corde alors on ne se faisait pas trop de soucis même si la météo annonçait la tempête de neige pour la nuit, l’objectif étant d’arriver à cette route forestière avant la nuit, ce qu’on a largement réussi. Une fois à la voiture, je jette un coup d’œil au toponeige qui confirme qu’il faut aller à gauche. Je me sens con de ne pas l’avoir pris. Belle journée malgré tout mais à méditer pour la suite…

facette Est du Petit Charnier (2181m)
2.3 E1
B0


face NW en boucle (2561m)
5.1 E3 (45°/300m ; 40°/800m)
1150m (2600m D-)
B0